Le Figaro : L'étoile Kader Belarbi tire sa révérence
L'étoile Kader Belarbi tire
sa révérence
Marion Thébaud
11/07/2008 | Mise à jour : 10:40 |
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Après vingt-huit ans de carrière, le danseur fait ses adieux à l'Opéra pour se consacrer à la chorégraphie.
À 45 ans et des poussières, Kader Belarbi dansera pour la dernière fois Signes, de Carolyn Carlson, dimanche à l'Opéra Bastille. Un ballet qu'il a créé en 1997 et qu'il reprend au côté de Marie-Agnès Gillot avec un plaisir toujours aussi vif. Ce ballet étonnant est né de l'union de deux créateurs inspirés, le peintre Olivier Debré et la chorégraphe Carolyn Carlson. Une œuvre qui ne peut que séduire Kader Belarbi, peintre à ses heures. Dans sa loge, aucune de ses toiles, il est trop discret, mais un long pinceau posé sur le mur à côté des photos de ses enfants, et des clichés de Nijinski dans Prélude à l'après-midi d'un faune. Une loge qui résume la sensibilité d'un artiste rare. « Dans le milieu de la danse, on est vieux trop tôt et intelligent trop tard », dit-il avec une clairvoyance de vieux sage.
Né de père algérien et musulman et de mère française et catholique, il s'est choisi sa propre religion : la danse. « Cette discipline m'a appris à vivre. » Il ne parle pas de vocation, mais d'un réveil tardif à 19 ans. « En 1982, j'ai compris que la danse était autre chose que de réussir des pas ». Ce déclic est provoqué par l'arrivée de Noureïev à l'Opéra. « J'ai vu un mythe débarquer dans le cours de danse. Il a pris le cours avec humilité, dévotion. J'ai commencé à me poser des questions sur ce que je faisais à l'Opéra. J'en ai conclu que danser allait bien au-delà d'un simple métier. C'est un mode de vie. » À partir de là, il met les bouchées doubles. En 1985, Noureïev le remarque et lui propose de danser le rôle de l'élu du Sacre du printemps de Béjart. Le voici mis en avant, le processus est en route, et, en 1989, il est nommé étoile. La consécration, la fierté surtout pour son père, militaire, qui découvre que son fils est un artiste reconnu par l'institution.
Un projet avec la Chine
« Je n'ai jamais eu de souci à cause de mes origines, reconnaît-il, mais je ne les renie pas, même si je n'ai pas mené un combat pour l'intégration. Bien sûr, j'ai subi des vexations et des commentaires du genre : “Il danse pas mal pour un raton.” C'est indélicat, mais j'ai réussi à imposer ma personnalité. Je suis français, étoile de la première troupe nationale, n'en déplaise à ceux pour qui Kader n'est pas un prénom de bon ton. » Nulle agressivité chez cet artiste qui, tout en étant « hyperactif », connaît son besoin de sérénité. « Je ne me suis jamais projeté dans l'avenir. Dimanche, ce sera la dernière. Je n'y pense pas pour le moment. Bien sûr, je serai ému, soulagé aussi, car même si je ne cesse jamais de danser, je sais que je dois arrêter dans cette maison où l'exigence est quotidienne. À 45 ans, il est temps de passer à autre chose, la transmission, par exemple, et la création. »
Chorégraphe, Kader Belarbi a signé une création pour l'Opéra, Wuthering Heights, et a collaboré à la cérémonie d'ouverture de la Coupe du monde de rugby. Il devrait poursuivre dans cette voie. Il a un projet avec la Chine et doit monter un spectacle à la Cité interdite. En France, il aimerait poursuivre son travail de créateur à la tête d'un centre chorégraphique. « Mais rien n'est posé, précise-t-il. Pour le moment, j'ai répondu à une invitation du Centre national de la danse pour animer, les 27 et 28 septembre, un stage pour amateurs et professionnels. » Bientôt, il s'offrira quinze jours de vraies vacances avec ses enfants, dont la petite dernière, Pauline, lorgne déjà du côté de l'école de danse de l'Opéra. Le nom de Belarbi n'a pas fini d'exister à l'Opéra.
Opéra Bastille, 13 juillet, à 14 h 30. Matinée gratuite le 14 juillet, avec Vincent Cordier et Marie-Agnès Gillot
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sa révérence
Marion Thébaud
11/07/2008 | Mise à jour : 10:40 |
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Après vingt-huit ans de carrière, le danseur fait ses adieux à l'Opéra pour se consacrer à la chorégraphie.
À 45 ans et des poussières, Kader Belarbi dansera pour la dernière fois Signes, de Carolyn Carlson, dimanche à l'Opéra Bastille. Un ballet qu'il a créé en 1997 et qu'il reprend au côté de Marie-Agnès Gillot avec un plaisir toujours aussi vif. Ce ballet étonnant est né de l'union de deux créateurs inspirés, le peintre Olivier Debré et la chorégraphe Carolyn Carlson. Une œuvre qui ne peut que séduire Kader Belarbi, peintre à ses heures. Dans sa loge, aucune de ses toiles, il est trop discret, mais un long pinceau posé sur le mur à côté des photos de ses enfants, et des clichés de Nijinski dans Prélude à l'après-midi d'un faune. Une loge qui résume la sensibilité d'un artiste rare. « Dans le milieu de la danse, on est vieux trop tôt et intelligent trop tard », dit-il avec une clairvoyance de vieux sage.
Né de père algérien et musulman et de mère française et catholique, il s'est choisi sa propre religion : la danse. « Cette discipline m'a appris à vivre. » Il ne parle pas de vocation, mais d'un réveil tardif à 19 ans. « En 1982, j'ai compris que la danse était autre chose que de réussir des pas ». Ce déclic est provoqué par l'arrivée de Noureïev à l'Opéra. « J'ai vu un mythe débarquer dans le cours de danse. Il a pris le cours avec humilité, dévotion. J'ai commencé à me poser des questions sur ce que je faisais à l'Opéra. J'en ai conclu que danser allait bien au-delà d'un simple métier. C'est un mode de vie. » À partir de là, il met les bouchées doubles. En 1985, Noureïev le remarque et lui propose de danser le rôle de l'élu du Sacre du printemps de Béjart. Le voici mis en avant, le processus est en route, et, en 1989, il est nommé étoile. La consécration, la fierté surtout pour son père, militaire, qui découvre que son fils est un artiste reconnu par l'institution.
Un projet avec la Chine
« Je n'ai jamais eu de souci à cause de mes origines, reconnaît-il, mais je ne les renie pas, même si je n'ai pas mené un combat pour l'intégration. Bien sûr, j'ai subi des vexations et des commentaires du genre : “Il danse pas mal pour un raton.” C'est indélicat, mais j'ai réussi à imposer ma personnalité. Je suis français, étoile de la première troupe nationale, n'en déplaise à ceux pour qui Kader n'est pas un prénom de bon ton. » Nulle agressivité chez cet artiste qui, tout en étant « hyperactif », connaît son besoin de sérénité. « Je ne me suis jamais projeté dans l'avenir. Dimanche, ce sera la dernière. Je n'y pense pas pour le moment. Bien sûr, je serai ému, soulagé aussi, car même si je ne cesse jamais de danser, je sais que je dois arrêter dans cette maison où l'exigence est quotidienne. À 45 ans, il est temps de passer à autre chose, la transmission, par exemple, et la création. »
Chorégraphe, Kader Belarbi a signé une création pour l'Opéra, Wuthering Heights, et a collaboré à la cérémonie d'ouverture de la Coupe du monde de rugby. Il devrait poursuivre dans cette voie. Il a un projet avec la Chine et doit monter un spectacle à la Cité interdite. En France, il aimerait poursuivre son travail de créateur à la tête d'un centre chorégraphique. « Mais rien n'est posé, précise-t-il. Pour le moment, j'ai répondu à une invitation du Centre national de la danse pour animer, les 27 et 28 septembre, un stage pour amateurs et professionnels. » Bientôt, il s'offrira quinze jours de vraies vacances avec ses enfants, dont la petite dernière, Pauline, lorgne déjà du côté de l'école de danse de l'Opéra. Le nom de Belarbi n'a pas fini d'exister à l'Opéra.
Opéra Bastille, 13 juillet, à 14 h 30. Matinée gratuite le 14 juillet, avec Vincent Cordier et Marie-Agnès Gillot
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