vendredi, novembre 24, 2006

Bocage par Nancy Houston

La romancière essayiste Nancy Houston et Tzvetan Todorov signent une partie des textes de ce bel ouvrage dédié au Bocage, prêtant leurs plumes aux écrivains, poètes qui ont chanté " leur " bocage, celui du Berry hanté par Georges Sand, le bocage enchanté du Grand Meaulnes d'Alain Fournier, bocages de France magnifiquement photographiés par l'œil sensible de Jean-Jacques Cournut qui a su en traduire l'atmosphère, les lumières, l'étrange, si bien décrits par Alain Fournier… "Parfois son pied butait dans les ornières. Aux tournants dans l'obscurité, il se jetait contre les clôtures, et, déjà trop fatigué pour s'arrêter à temps, s'abattait sur les épines, les bras en avant, se déchirant les mains pour se protéger le visage. Parfois, il s'arrêtait, écoutait - et repartait… Et il s'engagea dans ce passage, heureux de n'avoir plus à franchir les haies et les talus. Au bout d'un instant, le sentier déviant à gauche, la lumière parut glisser à droite, et, parvenu à un croisement de chemin, Meaulnes, dans sa hâte à regagner le pauvre logis, suivit sans réfléchir un sentier qui paraissait directement y conduire. Mais à peine avait-il fait dix pas dans cette direction que la lumière disparut…" L'éditeur des œuvres de Nancy Houston, Actes Sud (dernier roman "Professeurs de désespoir" paru en septembre 2004) offre ici un portrait du Bocage "envoûtant", "nostalgique", "irrésistible" comme l'écrit si justement la romancière : "Un paysage qui enserre et rassure" (…) Ici nous vivons dans un autre temps, un temps qui, au lieu de s'emballer, semble se dilater, s'ouvrir, s'offrir. Ici nous vivons dans un autre espace sonore, ce n'est pas le silence on entend des bruits identifiables : la route, les machines agricoles, les insectes, les oiseaux… mais non ce grondement imperceptible de la ville, qui maintient le corps en état d'alerte permanent (Peut-être parce que les pieds des citadins ne touchent jamais terre ?) Qu'aimons-nous dans le Bocage tel que nous le montre les photographies de Jean-Jacques Cournut ? - demandent les auteurs - Un paysage qui semble n'avoir pas bougé depuis le XIXème siècle, sinon depuis le Moyen-Age…"

Viviane Le Ray "le cannois"