mercredi, novembre 07, 2007

La Creuse est son fief, la littérature, son royaume. Les entretiens donnés par Pierre Michon nous guident vers ses terres secrètes. dans l'Express

Sur le fil des mots

par Marianne Payot / L'Express 20/09/2007

La Creuse est son fief, la littérature, son royaume. Les entretiens donnés par Pierre Michon nous guident vers ses terres secrètes.

Il n'y a pas que de mauvaises nouvelles. Et celle-ci est formidable: à peine sorti, l'ouvrage de Pierre Michon figure à la 20e place de notre palmarès. Pierre Michon, l'un de ces écrivains rares et secrets qui suscitent plus d'écrits qu'ils n'en commettent eux-mêmes. Invisible à la télévision, il fait, depuis plus de vingt ans, le bonheur des revues littéraires. Ce sont quelques-uns de ses entretiens accordés aux grands titres de la presse comme aux plus obscurs - Interlope la Curieuse, Les Passants immobiles - que cet apôtre de la brièveté a réunis ici sous un titre fort symbolique: Le roi vient quand il veut.

Car, depuis 1984 et son livre culte, Vies minuscules (Folio), publié à 38 ans, le roi de la Creuse n'est venu qu'une petite dizaine de fois distiller ses «blocs de prose». A l'instar d'Hugo, qu'il salue dans sa préface, Pierre Michon «préfère s'entretenir avec des morts compétents plutôt qu'avec des imbéciles vivants». Pour cela, il a choisi un genre inclassable: ni biographies ni romans, ses vies font «la part belle au légendaire, aux distorsions de la mémoire, aux interventions de l'au-delà». C'est ainsi que l'on retrouve, entraînés dans sa danse magique, les gens de peu de son village creusois, mais aussi quelques prestigieux écrivains (Rimbaud, Balzac, Faulkner, Beckett, Hugo) ou peintres (Van Gogh, Watteau, Goya, Claudio Tain,Piero della Francesca).

Un étonnant équilibriste
Pierre Michon joue l'épure, la ferveur, ose le tremblement, «comme un filde- fériste sur sa corde». Avec ce recueil, ses nombreux zélateurs admireront ses pas de deux ressuscités, et les autres découvriront un étonnant équilibriste. Parions qu'ils rattraperont le temps perdu en se jetant sur les Vies minuscules de cet écrivain capital.